ENTRETIEN DEVANT LES JUGES

May the odds be in your favor

« Nolan Wright, district Dix »

Nolan n’était pas réellement stressé pour sa prestation devant les juges. Il savait de quoi il était capable. Ce n’était pas la mer à boire, mais il se débrouillait quelque peu avec les couteaux. C’est donc ce qu’il allait tenter de démontrer. La traque, son autre « spécialité », si on le veut, était difficilement démontrable dans un environnement fermé comme celui de la salle d’entraînement. Il garderait ça pour l’arène, afin de surprendre les adversaires. Il pouvait s’amener tout doucement, sans se faire sentir, en évitant de piler sur quoique ce soit qui pourrait trahit sa position.

Les autres tributs vont mordre la poussière. Du moins, c’est ce qu’il se disait afin de se remonter un peu le moral. Bien qu’il n’était pas spécialement bas, celui-ci n’était pas au plus haut non plus; en fait, il ne l’a jamais été. Mais ça, c’est une toute autre histoire.

Il entra dans la salle, après la sortie du tribut du Neuf. Allait-il dépecer un animal ou tenter d’atteindre la cible avec ses couteaux? Quoiqu’il en soit, les juges semblaient festoyer tout en haut, en ne se préoccupant par pour le moins de ce qui se déroulait en bas. Il allait probablement recevoir une note générique, située quelque part dans la basse moyenne car après tout, qu’attendait-on de quelqu’un du Dix? Rien. Il entendait les juges faire des blagues tout là-haut, sur lui, sur Nolan, comme quoi il allait traire une vache ou bien nourrir un poulet devant les juges. Ce n’était pas le genre de Nolan d’être en colère, mais ces remarques le pincèrent quelque peu. Son caractère de petite merde revint à la charge, et il lança un « OH HÉ LÀ-HAUT! Arrêtez de vous gaver de viande de merde. Vous pensez que ça vient d’où? Je vous laisse y penser. Vos méchouis? Vos cochons sont pleins de merde car on a rien d’autre à leur donner. Bon appétit! » Avec cette remarque, il n’allait certainement pas s’attirer la clémence des juges. À vrai dire, il s’en balançait un peu. Après tout, le charisme et le tact ils ont passés tout droit lorsqu’il était qu’un fœtus. Ça lui allait parfaitement comme ça.

Sur un coup de dé mental, il choisit de lancer des couteaux sur une cible. Pourquoi? Aucune idée, car il n’était pas le meilleur mais au moins il savait s’y prendre. En règle générale, il atteignait la cible parfaite une fois sur deux, une fois sur trois. Il prit donc quatre couteaux dans l’arsenal, puis s’élança.

Le premier fit son chemin, mais atterrit sur le dernier rond que comportait la cible, à droite. Il prit davantage son temps pour le deuxième, son orgueil en ayant pris un coup. Il n’avait probablement l’attention que d’un ou deux juges s’il était chanceux, et voulu absolument toucher le centre. Il prit une grande respiration et lança son couteau.

Il arrive tout juste à gauche du centre. Il avait pratiquement envie de s’ouvrir la gorge avec le troisième. À ce moment, l’important pour lui n’était même pas d’impressionner les juges; il était entré dans une sorte de compétition avec lui-même, un côté que peu de gens lui connaissent. À vrai dire, il ne sait même pas si quelqu’un l’a déjà vu dans un pareil état. Le troisième couteau atterrit un peu à droite du centre. Il était si proche. Pour son ultime couteau, il ne pensa pas et le lança le plus fort possible. Enfin, celui-ci vint se loger entre le deuxième et  le troisième couteau, parfaitement au centre. Il serra quelque peu le poing, et dans un geste de confrontation envers les juges, ne les remercia pas, et quitta simplement la salle en silence.

En quittant, il fit un sourire au tribut du Onze qui s’apprêtait à rentrer et se dirigea vers le dixième étage de la Tour des Tributs.