La nuit avait été douce. Aussi avais-je choisi de rester faire la grasse matinée. Ce n'était pas tous les jours qu'on dormait dans un lit dix fois plus grand que soi et qu'on se reposait sur un matelas aussi moelleux. Les entraînement allaient attendre plus tard. De toutes façons, c'était une session de groupe avec tous les tributs. Je préférais nettement apprendre lorsque j'étais seule avec mon mentor, Alex. Au moins, je n'avais pas à supporter le regard des autres et je pouvais me concentrer totalement sur ma progression. Puis chez moi, ma sorcière de belle-mère ne me laissait pas dormir aussi longtemps dans la matinée. Enfin débarrassée de cette salope de sangsue et de ses empotés de fils. Sérieusement, mon père n'était vraiment pas doué lorsqu'il s'agissait de choisir qui allait partager sa vie de merde.

Bref. Comme je ne voulais pas devenir une larve humaine avant le début des jeux de la faim, je décidais tout de même de me lever aux alentours de... Bref. Ça n'avait pas d'importance. Je prenais le temps d'émerger correctement pour ne pas avoir l'air d'un zombie. De toutes façons, l'entraînement devait déjà avoir commencé depuis quelques heures. Alors si je devais arriver un jour, autant arriver avec classe. En l'occurrence, les bâillements intempestifs et les cernes sous les yeux, c'était loin d'être classe. Quoique mieux valait se montrer discrète pour se faire oublier une fois dans l'arène. Il ne fallait pas que je me fasse des ennemis d'entrée de jeu. Pas trop, en tous cas. 

Comme à mon habitude, je pénétrais dans la salle d'entraînement un peu comme une fleur. Je n'étais pas motivée ce matin. J'avais une soif d'apprendre, certes, mais qui n'avait jamais eu un peu la flemme un jour ? Je m'assis à l'atelier des nœuds et écoutais le responsable parler d'une oreille distraite. Je préférais nettement les bouquins disposés sur la table à sa voix atrocement monotone. Ils m'apprenait bien plus d'ailleurs. De toutes façons, je doutais que les nœuds me soient d'une grande utilité une fois dans la cage aux lions. Mais bon. Savait-on jamais. Partir avec un minimum de connaissances ne faisait pas de mal. Peut-être que ça allait me sauver. Peut-être que non. Je n'avais pas l'esprit à faire autre chose que ce genre de trucs plats et théoriques.

« Salut moi c'est. Alexander Byron je suis le gars qui vient du district 1. » Tiens. Un carrière qui venait parler à une "cloporte" non carrière. C'était plutôt inhabituel, mais ma foi pas désagréable. Si je pouvais éviter de m'en faire un ennemi, ça aurait toujours été ça de gagné. Il possédait un certain charme. Son T-Shirt collait à ses abdominaux saillants. Il avait fait de l’haltérophilie toute la matinée, c'était compréhensible. Comment ne pas le remarquer alors que nos deux ateliers se trouvaient côte à côte ? « Hello ! Moi c'est Maxine, du district trois. » Dis-je avec un sourire aux lèvres tout en lâchant ce que j'étais entrain de faire pour lui tendre une main. « Alors ? Comment va ? » Ouais. Soyons polis quoi. Nous étions des êtres civilisés après tout. « C'est bizarre qu'un gars comme toi vienne parler à une fille comme moi. Pas que j't'aime pas ou que j'te trouve repoussant hein. Mais les carrières, généralement, ça traine qu'avec les carrières... »  

Il avait l'air plutôt sympathique le beau gosse tout en muscles. Une nette évolution pour l'espèce des carrières ! Finalement, les alliances entre "super monstres du combat" et "cloportes des districts pauvres" pouvaient peut-être voir le jour. Enfin. Peut-être aussi qu'il était gentil et qu'une fois dans l'arène, il n'allait pas hésiter à tous nous éviscérer comme des animaux. Une possibilité comme une autre. Qui ne bluffait pas même un tout petit peu dans ces terribles jeux ? Personnellement, j'avais déjà une alliée. La fille du sept. Bon, ce n'était définitivement pas la plus costaud, mais côté cerveau, on était toutes les deux de véritables tanks. Il nous fallait juste quelqu'un de costaud pour nous protéger... Parce que oui, j'avais beau apprendre à maîtriser l'épée avec Alex, mon mentor, je n'égalais certainement pas les carrières. Je me débrouillais, mais c'était là le maximum. Et mon habilité au tir ne me servait à rien au corps à corps.

Bref. En conclusion, si je pouvais m'en faire un allié, ça serait trop méga-top-hyper-supra cool. Je voulais ressortir vivante des Hunger Games. Et me faire de puissants alliés n'était absolument pas de refus. Ma note devant les juges était haute et me handicapait, puisque tout le monde me croyait potentiellement dangereuse. Mais maintenant que j'y pensais, ça me permettait aussi de prouver ma valeur et de faire genre "je ne suis pas complètement inutile dans une alliance". « Contente d'entendre que je ne suis pas la seule à mourir d'ennui. Parce que comme tu peux le constater, ce que je fais est aussi passionnant que de regarder une plante pousser. » Faire des nœuds... Ou comment réussir à vous rendormir juste après être sorti du lit. J'arrêtais finalement ce que je faisais pour me tourner vers lui, restant néanmoins assise sur mon tabouret. Beh oui, en cette triste matinée, j'étais d'une fainéantise à en dorer les fesses du père noël.

Il semblait réellement s'intéresser à moi en fait. Et il avait absolument raison. Je ne m'étais pas portée volontaire. D'ailleurs, si un de mes demi-boulets de frères avaient eu des couilles, je n'en serai certainement pas là. « Pas de problème, ce n'est pas comme si j'avais quelque chose à cacher ! » Dis-je en souriant. Beh oui... Ma vie était digne d'un roman réaliste, tellement il ne s'y passait rien. Seule l'utilisation de quelques joujous explosifs venaient rythmer celle-ci. « Mon père s'est remarié après la mort de ma mère. J'ai une sœur et trois demi-frères. Eh ouais, chez moi, c'est les joies de la famille recomposée ! Enfin. Rien d'hyper palpitant comme tu peux le constater. » Côté amis, c'était déjà plus compliqué. Ma vie sociale était comparable au néant. Je fis donc clair et concis : « Sinon, pas trop d'amis. Des connaissances par-ci par-là... Mais rien de très passionnant. » En réalité, je ne trainais qu'avec ma sœur. C'était elle, ma seule amie. Ensembles, on faisait les quatre cents coups. C'était comme... Je ne sais pas, Tweedledum et Tweedledee en version sexy.  

Puisqu'il s'était intéressé à moi, j'allais m'intéresser à lui. De toutes façons, ce n'était pas très dur de s'intéresser à un gars de son gabarit. Il devait avoir une foule de prétendantes à ses pieds avec son physique. Il ne me laissait pas indifférente non plus ma foi. « Et toi ? Tu t'es porté volontaire ? » C'était très probable. Après tout, la plupart des carrières venaient pour amasser gloire et fortune. « Tu viens d'une famille riche et puissante et tu veux lui apporter la reconnaissance du Capitole ? » Ajoutais-je sur le ton de la blague. De légers éclats de rire sortaient de mes lèvres. J'espérais qu'il n'allait pas mal le prendre. Ça aurait été vachement débile de perdre un allié de choix à cause d'une vanne foireuse quand même.